lundi 28 octobre 2019

Les immanquables de 2019...Partie 2





Deuxième et dernière partie de ces immanquables de 2019! 

On attaque sans tarder avec ce qui est, pour votre blogueur, la crème de la crème, le trio de tête jusqu'à présent. Mais gardons à l'esprit que l'année nous réservera encore probablement quelques surprises et que le vrai top, c'est pour fin décembre.





Green Book: Sur Les Routes du Sud



Well Said Nodding GIF - WellSaid Nodding Gotcha GIFs
Yep, on est sur le podium chef.


On attaque la dernière ligne droite de ces immanquables avec un sérieux prétendant au titre de film de l'année, j'ai nommé Green Book de Peter Farrely. 

Sans doute la 38563ème oeuvre sur le racisme, cette nouvelle tentative brille par sa manière légère d'aborder de lourdes thématiques logiquement amenées par un livre - ce fameux Negro Traveler's Green Book - qui fut un guide de voyage utilisé de 1936 à 1966 dans le Sud des USA pour indiquer aux Noirs quels motels et restaurants ils étaient autorisés à fréquenter (non, ceci n'est pas une blague). 

Notre histoire (inspirée de faits réels) prend donc place en 1962. Tony Villalonga (Viggo Mortensen), un attachant videur de boîte de nuit, casse-cou à l'appétit démesuré, frappe sur le mauvais bougre et se retrouve du soir au lendemain...sans emploi.
Pour assurer la stabilité de sa famille, il se voit contraint d'accepter un boulot de chauffeur, loin de sa femme et ses deux enfants pendant plusieurs mois.

En outre, il n'imaginait pas devoir sillonner le Sud des Etats-Unis avec un passager de renom en tournée: le grand pianiste Don Shirley (Mahershala Ali). 
Celui-ci est tout ce que Tony n'est pas: bien éduqué, sophistiqué, méticuleux et...Noir. 
Or, Tony a beau être un bon gars, il a en lui quelques préjugés racistes sortis de son Bronx profond au sujet des Afro-américains

Tout cela va bien entendu changer.

Dans ce Miss Daisy et son Chauffeur inversé, la partition du réalisateur est entraînante, glissant à la surface d'enjeux complexes pour de temps à autres y plonger suffisamment afin de nous en laisser toucher la substance émotionnelle sans s'y noyer. Une réussite évidemment due en grande partie à son duo d'acteurs principaux.
Mortensen et Ali s'effacent totalement derrière leur personnage pour livrer une performance d'une justesse éblouissante; l'un nous gratifie d'une étonnante prise de poids et d'un accent italo-américain des plus crédibles, l'autre y confronte son charisme et sa parfaite diction pour créer cette improbable alchimie digne des meilleurs buddy-road trip movies, où chacun apprend et change au contact de l'autre.

Ce duo est un pur régal à suivre du début à la fin, tant dans son humour imparable que dans sa vulnérabilité; leurs différends sont aussi hilarants que leurs failles sont touchantes.
Les deux gaillards apprennent à se connaître autant qu'ils jouent avec leurs nerfs respectifs. 
Et si certains moments sont prévisibles (Tony n'est pas doué avec la prose donc, ô surprise, Don Shirley va l'aider bon gré mal gré à écrire les lettres destinées à son épouse), quelques détails dans l'exécution globale offrent de bonnes surprises.

On pense surtout aux puissantes prestations du pianiste virtuose qui sont au diapason avec la dynamique de leur amitié naissante, presque autant que leurs dialogues d'ailleurs. 
Une évolution, ou même transformation, musicale particulièrement prégnante lors du dernier show de leur tournée, où plusieurs idées du long-métrage tournant autour de l'ethnicité et de l'identité trouvent une plaisante conclusion.

Et même si la polémique enfla autour de la véracité des faits, lissée pour offrir un final léger, digne d'un film de Noël à la Frank CapraMême si on aurait aimé que la mise en scène soit aussi virtuose que le pianiste dont il est question (aucun plan ne marquera durablement vos rétines), vous pourriez vous surprendre à avoir à la fois un grand sourire aux lèvres ET la gorge nouée.
Car Green Book nous rappelle tendrement que l'on peut rire de tout, sans nous faire complètement oublier que l'Homme demeure cet étrange animal capable du pire. 


Conseillé: A ceux qui veulent se délecter d'un film drôle, touchant, avec du fond.

Déconseillé: A ceux qui voudraient que le Negro Traveler's Green Book existe encore.


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Toy Story 4

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Un nouveau Toy Story?! HAHAHA *rire nerveux*


Seule et unique suite de ces 7 immanquables 2019 et pour cause, Toy Story est pour votre blogueur un fidèle compagnon de route; j'avais 10 ans quand le premier chef-d'oeuvre de Pixar s'est dévoilé au cinéma devant mes yeux ébahis. 

Ensuite, cette trilogie en devenir et ses héros n'ont cessé de me faire rêver, de m'inspirer et de me faire garder foi en l'existence d'un cinéma d'animation hollywoodien de qualité. 
Oui, même si Disney-Pixar s'égare parfois, il subsisterait toujours quelque part cet instinct créatif, cette flamme originelle qui vous donnerait à vous-même l'envie de vous lancer, de raconter des histoires peu importe l'âge de votre public.

Puis vint l'annonce d'un quatrième épisode et son lot d'inquiétudes... Qu'ont-ils de plus à raconter? La trilogie n'était-elle pas suffisamment aboutie? Vont-ils tout gâcher avec un épisode de trop? Pompe à fric ou oeuvre sincère?

Et le 26 juin 2019 arrive, on entre en salle obscure avec la boule au ventre, de peur qu'après Le Hobbit et autres Dragons, l'industrie ne viennent encore pourrir l'une de nos sagas favorites sans scrupule avec ses films superflus qui vous ternissent jusqu'à vos pensées nostalgiques, jadis réconfortantes.

Après les bandes-annonces, les lumières se tamisent puis c'est le noir et le court-métrage...euh Toy Story 4 commence?! 



Et le court-métrage? PAS DE COURT-METRAGE ?! 



PIXAR EST-IL MORT !?! 



Ah, ma petite voix me me glisse qu'ils ont créé une branche en interne pour laisser libre cours aux idées des jeunes animateurs. Terminée l'obligation du court-métrage avant chaque film, maintenant c'est buffet à volonté

Merci Google, hum, petite voix.


Mais alors, Toy Story 4 commence directement?! J'étais pas prêt ! On se ressaisit et on tente de profiter du photo-réalisme des premiers décors qui apparaissent sous nos yeux, détrempés par une pluie battante, l'illusion est parfaite.

La forme est sublime, mais quid du fond

Après un prologue mené tambours battants qui pose les enjeux du film, on commence à devenir nerveux: d'abord, la petite Bonnie nous fait le coup très classique des vieux jouets laissés au placard pour s'amuser avec les plus clinquants (Woody étant évidemment le ramasse-poussières de service). 
Ensuite, elle se fabrique littéralement un nouveau jouet qui se nommera sobrement Fourchette; composé dudit couvert en plastique usagé agrémenté d'autres objets de récup', ce nouvel ami se voit malgré lui attribué le rôle de jouet, et par extension le don "absurde" de la vie. Qu'il le veuille ou non.

D'ailleurs, Fourchette est convaincu d'être un détritus et fait tout pour retourner dans son abîme sans danger : la poubelle. 
C'est précisément là qu'on commence à perdre patience puisque l'oeuvre prend une tournure inoffensive,  à base de gags visuels où Woody cherche inlassablement à empêcher le nouveau jouet de retourner aux déchets durant une escapade familiale vers la fête foraine.

Cependant, après une demi-heure, enfin, Toy Story 4 cesse de tourner en rond et retrouve l'étincelle quand Woody entre en contact avec une vieille connaissance, Bo Peep, alias La Bergère, ce personnage secondaire qui laissa un vide derrière elle après avoir été donnée à un nouvel acquéreur, préfigurant le destin des autres protagonistes. 
Elle est donc de retour, s'étant réinventé une vie épanouie de rebelle, vivant au jour le jour avec sa bande de jouets perdus.

Dès sa réapparition, la narration trouve son rythme de croisière et le film dévoile le secret de sa légitime existence en plus d'introduire une galerie de nouveaux personnages plus drôles les uns que les autres: par exemple, le cascadeur "raté" Duke Caboom saura vous toucher tandis qu'on s'efforce de ne pas rire trop fort à chaque apparition des inséparables Ducky et Bunny, véritable duo de stand-up dont je ne dévoilerai rien pour que votre surprise reste intacte. 
Même l'étonnant nouvel antagoniste est réussi car tout est mis en oeuvre pour que nous le comprenions et tissions un lien avec lui...

Une pléiade de nouveaux jouets qui font ici passer les humains et leurs envies au second plan
Voilà ! C'est précisément là que se dissimulait le coeur de ce nouvel opus; là où la trilogie se focalisait sur l'anxiété de se séparer de l'humain, Toy Story 4 se concentre plutôt sur cette notion abstraite qu'est la raison de vivre et sur la prise de pouvoir sur son propre destin
Pour la première fois, le studio parle intrinsèquement des jouets plutôt que de leurs liens avec leur propriétaire, puisque leur inévitable côté éphémère nuit à la tranquillité des plus obstinés, tels que Woody et son groupe de toujours.

Bien sûr, rien de ceci ne m'est apparu durant le visionnage du long-métrage, devant lequel j'ai à nouveau ri et pleuré comme l'enfant de 10 ans encore en moi. 
En effet, directement après s'être délecté de ce grand spectacle visuellement stupéfiant, orchestré de main de maître, on se dit simplement que que si Toy Story 3 était l'adieu à Andy, le 4 est la conclusion que Woody méritait... 

Puis les lumières se rallument et les thématiques infusent, s'imposent à nous, doublées du soulagement de ne pas avoir vu nos précieux souvenirs saccagés. 

Et maintenant, Pixar, merci de ne plus y toucher. Laissez votre incroyable saga s'installer confortablement au rang des meilleures de l'Histoire du Cinéma...

Conseillé: Aux fans, qu'ils soient petits ou grands, de la trilogie Toy Story.

Déconseillé: A ceux qui n'entrent pas dans cette catégorie.



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Joker


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Joker, le rôle d'une vie?


Immergeons-nous dans le Gotham City des années 80. Les riches s'enrichissent, les pauvres s'appauvrissent, les éboueurs sont en grève et les rats pullulent dans les tas d'ordures. Les odeurs nauséabondes envahissent les taudis de la ville.

C'est ici qu'on retrouve Arthur Fleck, clown professionnel tourmenté et aspirant humoriste. Assis devant un miroir, il se maquille le visage et se force à sourire en étirant sa bouche à l'aide de ses doigts. Une larme roule sur ce rictus, emportant un peu de bleu avec elle. 
Ainsi débute Joker, sans costumes moulants ou criards ni effets spéciaux, mais juste un homme. Un clown triste.

Arthur est l'une de ces "victimes de la vie", il est tabassé, moqué, maltraité. Un peu trop familier avec le goût du sang en bouche.
Il n'est cependant pas un solitaire ou un incompris, il ne parvient juste pas à se mêler aux gens. Son existence quotidienne même relève de l'impossible tant les règles et codes de la société lui sont inappréhendables
Il reste donc en retrait du monde, en partie à cause d'une maladie dont je ne dévoilerai rien puisqu'il s'agit de l'une des meilleures idées du film: à chaque fois qu'elle se manifeste la société semble reculer d'un pas supplémentaire.

" je ne veux simplement plus me sentir aussi mal", murmure un Arthur qui est traité par sept médicaments différents et est suivi depuis longtemps par un système qui n'a en réalité pas de vraies ressources ni de temps pour lui.
C'est un murmure désespéré qui, vous l'imaginez bien, ne sera écouté par personne et marquera les débuts de sa descente aux enfers via un escalier dont chaque marche sera l'une des étapes de sa transformation en Joker

Ecartons vos doutes d'un revers de la main: le film est bel et bien une origin story qui effleure juste assez la mythologie de Batman pour ne pas tomber dans un fan service devenu lassant dans les adaptations de comics.

D'ailleurs, ne vous y méprenez pas, c'est une profonde, lente et chaotique étude de personnage que nous propose le réalisateur Todd Philips plutôt qu'un film de super-vilain grand public, et votre empathie pour Arthur sera mise à mal, quitte même à se dissoudre quand il franchira certaines limites de l'éthique.

Pour incarner tout en nuances ce rôle des plus difficiles, Joaquin Phoenix se montre juste renversant...
Le cinéaste (et co-scénariste!) déclara qu'il conservait une photo de l'acteur visible au-dessus de son écran en écrivant le script, et le moins que l'on puisse dire c'est que cette source inspiration s'avère au final plus que payante. 

Phoenix est habité par Arthur: ayant perdu 22kg pour le rôle, il apparaît frêle et affamé. La (superbe) photographie souligne ses côtes apparentes. Sa physicalité est précise dans chacun de ses mouvements et accompagne parfaitement son évolution.
Son intensité dévore l'image et nous captive, nous fascine jusqu'à en oublier qu'il s'agit d'une performance.
Aussi, le comparer aux immenses Heath Ledger et Jack Nicholson n'aurait pas de sens tant son Joker apporte une nouvelle fois quelque chose de différent au personnage. Chacun aura bien entendu sa propre préférence mais, en définitive, on a presque envie d'appeler ce film Arthur et non Joker, car on aura fait un bout de chemin avec l'homme plutôt qu'avec l'entité dévastatrice qu'est le Clown Prince du crime.

Ceci découle directement du choix de s'écarter du matériel source; Todd Phillips précisa que même si quelques éléments ont été puisé dans le chef-d'oeuvre The Killing Joke d'Alan Moore, son film ne suivrait pas du tout les comics
Une décision certes audacieuse au regard de la bouillonnante fanbase du personnage, qui se révèle finalement comme étant un as sorti de sa manche; l'oeuvre n'a aucun lien avec le bancal Univers Cinématographique DC. Il s'agit d'un film et d'un personnage totalement émancipés de toute attache. Libres d'êtres ce qu'ils veulent, en one shot (ou non? A voir dans les prochaines années...).

Et s'il s'agit indiscutablement d'un film fait pour Phoenix, le reste du casting s'en tire également très bien. 
On pense évidemment à Robert De Niro dans le rôle de l'animateur de son propre Late Night Show télévisuel, Murray Franklin
Une figure médiatique influente qui rappelle fortement les classiques de Martin Scorsese, et pour cause: Todd Phillips n'a jamais dissimulé son admiration pour le cinéma du grand Marty. Une influence peut être un poil envahissante puisqu'on ne peut s'empêcher de penser au nihilisme de Taxi Driver et au cynisme de La Valse des Pantins, deux films caustiques qui empêchent Joker de résolument prétendre à l'originalité, là où un The Dark Knight convoquait le cinéma de Michael Mann en étant toutefois capable de s'en affranchir dans ses instants les plus mémorables.

Tant qu'on y est, un autre bémol réside dans l'omniprésence de la bande-son dépressive composée par Hildur Guðnadóttir
Elle surligne au Stabilo le mal-être du protagoniste principal et ses tambours lancinants, très présents dans le premier acte, rappellent ceux qu'on entendait sur les galères d'esclaves - souvenez-vous d'Astérix - pour que les rameurs restent en rythme. 
Affaire de sensibilité bien sûr mais dans le dernier acte pourtant, la partition accompagne parfaitement le crescendo visible à l'écran pour une combinaison qui donne le frisson.

On ne boudera certainement pas notre plaisir car ce Joker fait du bien dans le paysage cinématographique hollywoodien actuel. Téméraire vis-à-vis de la société, dévastateur et juste beau dans sa démarche, ce Joker n'est pas seulement une réinvention du super-vilain le plus iconique de l'Histoire de la part de Phillips et Phoenix, puisqu'ils ont aussi bousculé, voire redéfini, les codes de l'adaptation de comic book. Une claque!


Conseillé: A ceux qui aiment l'univers de Batman autant qu'à ceux qui aiment les drames psychologiques sombres.

Déconseillé: Aux ados qui ne jurent que par les Marvel cinematic et autre DC extended universes, ce n'est pas le même délire.





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lundi 21 octobre 2019

Les immanquables de 2019...Partie 1





Post-Générique est ENFIN de retour après avoir vu une trentaine de films en salles obscures en 2019.

Et puisque je n'ai pas envie d'attendre le traditionnel top de fin d'année pour vous reparler de Cinéma, revenons en deux articles distincts sur les 7 films qui, à mon sens, ont déjà marqué 2019 d'une belle empreinte. 
On se réserve le véritable top et les notes  /10 pour fin décembre.



Le Chant du Loup



Eh ouais mon petit, on est dans un bon film français. Tu veux ma photo?
“Grandchamp:
Chanteraide: 👀 👀 👀 😍😍😍
”
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Chanteraide: 👀 👀 👀 😍😍😍
”
Quoi qu'on dise sur un cinéma francophone toujours bien disposé à nous gaver annuellement d'une bonne centaine de films formatés (à 90% des comédies "fast food") pour plaire au plus grand nombre, il y a toujours bien un moment où une pépite inattendue fait son trou dans les tops annuels.
En l'occurrence, ce moment où un jeune réalisateur (Antonin Baudry) va débarquer avec une déclaration d'amour au cinéma de genre.

Plantons le décor: nous sommes au sein du Titane, un sous-marin nucléaire voguant au Moyen-Orient pour récupérer des troupes larguées à terre pour une mission clandestine. 
En salle de contrôle, le commandant (Reda Kateb) et son bras-droit (Omar Sy) attendent le verdict de leur "Oreille d'Or" (François Civil), un technicien à l'ouïe exceptionnelle chargé d'interpréter chaque son détecté par le vaisseau. Le doute n'est pas permis et pourtant il est là, insoutenable: l'Oreille hésite; est-ce une frégate iranienne ou un leurre qui lui martèle les tympans? Sous pression, il tranche...mais il tranche mal et c'est tout un équipage que son choix met en péril!

Sans en dévoiler davantage, je vous recommande cette expérience hautement immersive.
Hyper crédible grâce à l'usage intensif du vocabulaire appartenant au monde très spécifique qu'est celui inhérent aux sous-marins nucléaires, mais aussi à son contexte géopolitique tendu, Le Chant du Loup est un thriller impressionnant pour une production franco-européenne au budget dix fois inférieur à celui des grosses machines hollywoodiennes.

Antonin Baudry dépeint avec brio l'intensité des relations humaines en milieu confiné sous haute pression, bien aidé par la performance de ses comédiens et par le superbe boulot fourni sur le design sonore et les décors. 

En résulte une oeuvre maligne, parfois grandiloquente mais toujours captivante qui se hisse au niveaux des cadors du genre (A la poursuite d'Octobre Rouge, Uss Alabama,...) et, à l'heure où on peut craindre le chant du cygne du cinéma de genre francophone, Le Chant du Loup rassure énormément.

Conseillé: A ceux qui sont attirés par un thriller qui plonge à 20.000 lieues des sentiers battus.

Déconseillé: A ceux qui comptent zapper le film au bout de 15min sous prétexte de jargon "trop compliqué à suivre". Oui, je vous vois là au fond!



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Parasite


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Portrait de votre blogueur devant les Palmes d'Or cannoises habituelles.

Une Palme d'Or à Cannes, est ce vraiment un gage de qualité? Pour m'être endormi devant plusieurs d'entre elles, je vous en laisserai seuls juges.
Par contre, quand un thriller signé Bong Joon-Ho (Memories of Murder, Mother, The Host,...) se retrouva récompensé, ma curiosité fut piquée au vif.

Et grand bien m'en fut.

Sans trop dévoiler de cet insolite quasi huis-clos, l'intrigue gravite autour d'une attachante famille Kim vivant dans l'entresol d'un immeuble, cohabitant avec les cafards, galérant pour capter le Wi-Fi du café d'à côté,  et sur laquelle l'extérieur pisse sans vergogne, au sens propre comme au figuré. Ils vivotent concrètement en assemblant des boîtes à pizzas.

Mais les Kim sont opportunistes et quand se présente à l'aîné de la famille l'occasion d'aller enseigner l'Anglais à la lycéenne des richissimes Park, il ne la manque pas, sans savoir que ce choix marquera le début de gros ennuis.

Filmant la grande propriété des Park avec un talent qui permet au spectateur de toujours savoir précisément où il se trouve, le réalisateur fait graduellement basculer cette délicieuse comédie vers un thriller dramatique d'une noirceur déstabilisante et subversive.

Seule ombre au tableau, le manque récurrent de finesse de Bong Joon-Ho pour faire passer son message sur la lutte des classes; les pauvres puent et les riches se comportent comme des bouffons pour être sûr que l'empathie ne naisse pas vraiment. Les excès du film finissent par créer en second acte une petite distance entre lui-même et le spectateur alors que la première heure réalisait un sans-faute.
Face à ce grand jeu d'impostures, il y aura deux écoles: les uns se délecteront du côté satirique caricatural limite grand-guignolesque, déjà bien présent dans Okja et Snowpiercer, les autres préfèreront toujours le sérieux et la gravité de Memories of Murder ou encore Mother

Mais tous seront d'accord sur le fait que le cinéaste n'avait jamais encore mis en scène avec une telle précision au service d'une photographie aussi soignée, comme touché par la grâce formelle
Puis, admettons-le, ces ultimes minutes au goût doux-amer ont quelque chose de troublant et paradoxalement réconfortant.

Conseillé: A ceux qui pensent que le cinéma asiatique n'a rien à leur offrir.

Déconseillé: A ceux qui souhaitent voir un thriller à la David Fincher. Ce n'est pas le même type d'ambiance ni de noirceur. 



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Vice

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Bush ne croyait pas si bien dire...


Adam McKay, le réalisateur de The Big Short, est de retour et ne peut toujours pas contenir sa colère envers les institutions brisées de l'Amérique. Il nous raconte ici la vie de l'ancien vice-président des States, Dick Cheney, un politicien réservé mais influent qui métamorphosa un bureau ricain à responsabilités limitées en une machine de guerre surpuissante qui changea la face de leur politique domestique et étrangère, impactant l'économie, les Droits de l'Homme et donc le monde entier.

Christian Bale - ayant une nouvelle fois pris 20kg pour incarner un personnage - joue ledit Cheney qui, au départ, est un jeune alcolo gentiment pressé par son épouse Lynne (Amy Adams) de se reprendre en main et d'entamer une carrière en politique. Il met alors le cap sur Washington D.C. où il devient stagiaire pour Donald Rumsfeld (Steve Carrell), un membre du Congrès républicain dont les ricanements masquent à peine la perversité dans le domaine. 

Dick Cheney gravit les échelons de la Maison Blanche sur plusieurs années, y gagne en expérience et en notoriété jusqu'à ce que le vent tourne: sa santé défaillit. Il décide alors de se retirer dans sa propriété en Virginie et de prospérer dans le secteur privé. FIN... oui mais, et si un certain Georges W. Bush lui donnait un coup de fil pour lui proposer le poste de vice-président des Etats-Unis?

A l'instar d'un certain Richard III (prenons au hasard l'adaptation avec Ian McKellen), Vice décompose avec une acerbe ferveur l'influence que peut avoir une seule et même figure politique, même controversée. 
Et tout comme l'oeuvre de Shakespeare, le film ne cache jamais ses intentions; Vice ne sera pas un film que le public regardera pour sympathiser avec Cheney mais plutôt pour comprendre pourquoi tant de gens le détestent.

De ce fait, Christian Bale , Amy Adams et le reste du casting ont pour délicate mission de conférer une certaine humanité à des personnages qui ne montrent que très peu d'amabilité. 

A ce petit jeu, Adams s'en sort très bien. Sorte de Lady MacBeth (Shakespeare, quand tu nous tiens), elle manipule son monde du mieux qu'elle peut et remet en évidence le fait que "derrière tout grand homme se cache une femme", aussi vicié(e) soit-il(-elle).
Mais lorsqu'elle nous permet d'atteindre le coeur de Dick Cheney, le mal est déjà fait, car Bale passe la plus grande partie du film à camper un personnage qui a vendu son âme au diable et qui fut si grassement payé pour le faire qu'une remise en question semble inenvisagée. 

Et de quelle incroyable manière joue-t-il ce personnage! 
Il rend cet homme totalement crédible alors que s'il s'agissait d'une simple fiction, nous ne pourrions décemment croire en son existence. 
Notre véritable Oscar du meilleur acteur 2019, c'était lui.

Bref, en brisant à maintes reprises le 4ème mur (comme il le faisait déjà dans son moins accessible The Big Short) et en dressant subtilement le parallèle avec la situation actuelle, Adam McKay nous offre un délicieux commentaire politique sans le côté grave et rébarbatif lié au genre. 
Considérer l'une des figures publiques les plus insidieuses et dangereuses de ces 50 dernières années avec un humour aussi caustique n'a pas dû réjouir les instances républicaines mais quoi qu'il arrive, à la fin le Vice vous laissera sans voix.

Conseillé: A ceux qui pensent que tous les films politiques sont soporifiques.

Déconseillé: aux fervents défenseurs des institutions américaines.



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 La Mule



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"Prenez une épargne-pension" qu'il disait...

"Le meilleur film de Clint Eastwood depuis Gran Torino (2008)", une formule digne des phrases d'accroche les plus bateaux qu'on peut retrouver dans toute mauvaise bande-annonce mais cette fois, oui cette fois je vous le dis, on ne vous a pas menti.

Son histoire basée sur le fait divers d'un vieillard toujours très actif - bien qu'au crépuscule de son existence - devant livrer de la drogue pour un cartel mexicain est  engageante, humoristique et (dé)tournée de manière quasi autobiographique puisqu'elle représente avant tout un homme cherchant à expier ses erreurs en tant que mari et père, un rachat que Clint confesse vouloir opérer dans sa vie, lui qui est un bourreau de travail ayant eu assez peu de temps à consacrer à sa propre famille.

Il s'agit d'un aspect d'ailleurs très touchant de cette oeuvre dans laquelle le cinéaste légendaire parvient à insuffler du rythme et du suspense; on se demandera tour à tour si l'homme survivra au cartel et à sa cavale mais aussi s'il pourra se rapprocher de sa famille.
Puisque comme il le dit si bien: " On peut tout acheter, mais je n'ai pu m'offrir du temps".


Dans l'histoire du Cinéma, rares sont les géants à avoir été actifs aussi durablement (Eastwood fit ses débuts à Hollywood il y a 64 ans, il a tourné plus de 80 films depuis) et probablement aucun n'a été en haut de l'affiche aussi longtemps.
Certes, il y eut quelques relâchements, certains films mous voire trop longs, mais La Mule n'en fait pas partie et sa vitalité provient en partie de son chef-opérateur de talent, Yves Bélanger (ayant bossé sur Dallas Buyers Club, Premier Contact,...) ainsi que son scénariste Nick Schenk, déjà auteur du magistral et crépusculaire Gran Torino.

En tout cas, moins rageur et chaleureux que le sus-cité chef-d'oeuvre de 2008, La Mule n'en demeure pas moins particulièrement convaincant dans sa façon de nous transmettre les regrets d'un vieil homme dont l'objectif reste de s'améliorer, même à un âge très avancé auquel certains resteront de têtus ronchons. 
Eastwood continue d'écrire sa légende avec quelques derniers coups d'éclats comme celui-ci. 
Il nous en ferait même oublier son allégeance politique douteuse, ou en tout cas pas franchement  en accord avec sa filmographie d'un humanisme bouleversant.

Conseillé: A ceux qui pensent que Clint Eastwood est déjà enterré.

Déconseillé: A ceux qui attendent un film d'action où les cartels tirent sur les flics avec au milieu de la fusillade un vieil innocent ruiné par ses charges de retraité.



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A SUIVRE...