jeudi 28 juillet 2016

Critique du Bon Gros Géant



Une Bonne Grosse Guimauve?



Jusqu'ici, l'oeuvre de Roald Dahl et le cinéma ont toujours fait bon ménage : de la pétillante Matilda au(x) savoureux Charlie et la Chocolaterie en passant par le candide James et la Pêche Géante sans oublier un Fantastique Mr Fox qui porte bien son titre, chaque réalisateur s'y attelant a réussi à transposer fidèlement l'espiègle esprit du maître de la littérature jeunesse britannique, lui qui fut un marchand de rêves au regard délicieusement acerbe sur les vices typiquement humains, sans jamais devenir moralisateur pour autant.

C'est donc avec un enthousiasme certain que l'on se rue en salle pour découvrir LA rencontre artistique entre ces deux conteurs de génie que sont Spielberg et Dahl, deux magiciens de la narration qui partagent un talent hors-pair pour mêler l'ordinaire et le merveilleux, pour nous emmener loin du quotidien tout en y ayant un solide point d'ancrage.

Cette fois, c'est d'ailleurs à Londres que "l'ancre" est jetée, dans un orphelinat où vit Sophie, dévoreuse de livres et dévorée d'insomnie. 
La petite curieuse se fait kidnapper par un étrange géant qui semble observer les gens dormir par la fenêtre de leur habitat. Manque de bol pour Sophie, celle de l'orphelinat était grande ouverte et, à défaut de tomber dans les bras de Morphée ou d'avoir laissé le marchand de sable faire son travail, la voilà embarquée pour le pays des Géants, une terre hostile pour les petits humains que nous sommes.
Pourtant, ce Géant-là ne semble avoir aucune mauvaise intention et dit vouloir protéger son « hôte-malgré-elle » autant que son propre pays.
Serait-ce donc le début de la plus improbable des amitiés?

La réponse à cette question est tellement évidente qu'il conviendrait d'en poser une autre, plus tranchante: pourquoi ce nouveau film de Steven est-il si médiocre?
Car, autant le dire d'emblée, la déception ressentie au sortir de la salle est au moins aussi grande que le géant dont il est question; il était tellement improbable que l'immense Spielberg soit le seul à louper son adaptation de Roald Dahl, et pourtant...

Pourtant, l'oeuvre commence plutôt bien, on retrouve la maestria du cinéaste à chaque ample mouvement de caméra, que ce soit lorsque celle-ci déambule aux côtés de Sophie dans les couloirs de l'orphelinat ou bien dans la tanière du Bon Gros Géant.
De son côté, la magie du bouquin semble parfois présente mais l'absence d'enjeux forts se fait rapidement et cruellement sentir.
Habituellement, quand Spielberg adapte une oeuvre, il l'étoffe pour la faire résonner avec les thématiques récurrentes de sa filmographie, pour se l'approprier tout en gardant intact l'esprit du livre avec lequel il avait au départ une affinité.

Ici, ce n'est définitivement pas le cas, on étire l’intrigue au lieu de lui donner du corps; il en résulte un film au rythme bancal et à l'humour répétitif, voire niais quand il n'est pas carrément ridicule.

Il ne faut cependant pas s'y méprendre, Le BGG n'est pas un navet, il regorge de jolis moments jouant sur les échelles et de fulgurances oniriques mais se dégonfle dès qu’il s’agit de nous faire véritablement rêver. Un comble quand on sait que l’on nous présente un géant souffleur de rêves !

Une scène illustre d’ailleurs parfaitement ce pur gâchis: lorsque le BGG emmène Sophie en ville pour lui montrer sa manière de faire rêver les humains, il prend pour exemple un enfant auquel il vient d'offrir une conversation avec le Président des États-Unis en guise de rêve nocturne...Qui pensait-on éblouir dans le public avec un tel songe? N'y avait-il rien de plus magique à nous raconter?
Ainsi, la perplexité s'empare de nous à maintes reprises dans ce qui n'est au final, il faut bien s'y résoudre, qu'un simple(t) film pour enfants, mais pas de ceux qui comportent plusieurs niveaux de lecture comme les classiques du genre, non. Un long-métrage infantilisant qui est aussi inégal que la qualité de ses effets spéciaux, tantôt bluffants tantôt du niveau de Jack et le Chasseur de Géants (WETA semble ne pas s'être remis du Hobbit).
Un petit spectacle qui ne fera pas date dans la riche filmographie de son réalisateur, dont on attend bien plus et qui devra remonter la pente avec son prochain détour par la SF, Ready Player One.

Bref, Nous ne sommes pas face à un Bon Gros Désastre mais il s’en est fallu de peu, ce BGG est typiquement le genre de divertissement moyen d'un dimanche après-midi pluvieux, tout juste sauvé du naufrage par ses deux acteurs principaux et quelques moments de mise en scène qui relancent l'intérêt (deux plans séquences sont impressionnants) entre deux bâillements de l'assistance, faute de réel enjeu à se mettre sous la dent.
Accident de parcours ou véritable déclin de Spielberg? On attendra sagement du géant cinéaste qu'il nous livre lui-même la réponse en 2018.

Note :  5 /10

PS: Votre blogueur n'ayant pas vu l'adaptation animée datant de 1989, toute comparaison entre les deux versions est impossible.


Conseillé...
Déconseillé...

       - Aux amateurs de sieste pendant que leur(s) enfant(s) s'amuse(nt).

    - A ceux qui cherchent un divertissement ciné tout juste potable en cette période de vaches maigres.

      

       - Aux fans de Spielberg.

    
    - Aux inconditionnels de Roald Dahl.