Votre serviteur comptait à la base vous écrire
une tartine à propos de Miss Peregrine et les
Enfants Particuliers, prêt à confirmer ce que la presse affirmait dans
ses rubriques ciné, à savoir que le grand Tim
Burton était enfin de retour avec un nouveau bijou à ne pas manquer.
Il n’en sera rien puisqu’au final Miss
Peregrine nous donne une preuve supplémentaire du fait que
le cinéaste hirsute s’est probablement fait enlever par
des Martiens et remplacer par son jumeau nonchalant et caricatural,
qui use et abuse de la même recette depuis bientôt 7 ans. Une recette dont les
seuls ingrédients neufs ne font qu’apporter un peu plus de mauvais goût à
l’ensemble du festin auquel les nostalgiques rêvent encore.
Pourtant, le dernier Burton se
défend plutôt pas mal dans ses deux premiers actes avec la
présentation réussie de son univers et de ses enjeux, donnant raison à ceux qui
s’enflamment sur le retour de leur roi gothique mais le
château de cartes s’effondre d’un grand souffle lorsque méchants pathétiques et
scènes d’action risibles s’invitent au spectacle, ce qui n’est
d’ailleurs pas sans rappeler le dernier acte du gâchis Dark Shadows.
N’y voyez pas là une critique gratuite et
acharnée mais plutôt le cri du cœur d’un fan désabusé pour
la 5ème fois d’affilée.
En effet, si Miss Peregrine est
assurément un divertissement passable, est-ce suffisant quand il s’agit
de Tim Burton aux commandes ?
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Changeons de sujet avec la vraie bouffée
d’air frais de 2016, la plus belle surprise de ce
millésime jusqu’alors, j’ai nommé Captain Fantastic de Matt
Ross, avec notamment Viggo Mortensen et Frank
Langella.
Le postulat de départ est simplissime ;
depuis l’hospitalisation de sa femme, Ben (Viggo Mortensen)
poursuit seul leur plus belle réussite commune : élever leurs 6
enfants au cœur d’une forêt luxuriante, leur inculquant
des valeurs anticapitalistes et un respect total de la nature.
Pourtant, tout va basculer lorsque l’épouse de Ben décède,
obligeant la meute à se rendre en ville pour des funérailles qui
s’annoncent comme un choc culturel avec le reste de la
famille, bien intégrée à la société.
Balayons d’emblée les doutes d’un
revers de la main, Captain Fantastic évite les pièges du
film indépendant moralisateur et pas subtil pour un sou.
Oui, Le recul pris par le cinéaste pour
raconter l’histoire et le devenir de cette famille est bluffant ;
difficile de dire au final si Ben pourrait prétendre au titre
de meilleur père du monde ou si ses méthodes strictes
d’éducation évoqueraient celles d'un tyran.
Son portrait d’homme solide comportant des
fragilités en font un personnage extrêmement touchant, brillamment
interprété par un Viggo Mortensen au sommet de son art
(peut-être sa meilleure performance d’acteur?).
Et la troupe d’«enfants» (l’aîné ayant
plus de 20 ans) n’est pas en reste, ils bénéficient tous d’un soin particulier
et l’on ressent que chacun a été dirigé avec minutie, rappelant au
passage le personnage de Ben qui ne laisse aucun de ses
enfants pour compte, leur donnant le maximum de son temps afin d’en faire des
êtres accomplis, polyglottes, cultivés et athlétiques tels les Enfants
Perdus de Peter Pan mais… prisonniers du mode de pensée du pater
familias?
Matt Ross nous livre en tout cas une œuvre ambiguë d’une
beauté visuelle indéniable. Pour son premier film distribué
mondialement il se paye le luxe de donner un coup de pied dans la fourmilière des
divertissements écolos un peu trop prompts à nous donner la
solution miracle à tous les maux sans questionner les pour et les contre d’une
vie dédiée à la nature ; pour exemple, les enfants de Captain
Fantastic sont brillants mais n’en demeurent pas moins impolis en
société et n’hésitent pas à voler quand leur patriarche leur
en donne le signal.
Où sont les limites d’une telle éducation ?
La vie en marge de cette société qui nous phagocyte dès le
plus jeune âge est-elle réellement possible ? Ce Ben n’est-il
pas plutôt un Captain Utopian qu’un Captain
Fantastic ?
Autant de questions autour desquelles le film
laisse le spectateur s’interroger et débattre à sa guise sans pour autant être
prise de tête car le long-métrage sait aussi faire naître
le rire au détour de situations cocasses mais aussi émouvoir.
Ce qui amène d’ailleurs à parler des
quelques faiblesses du film ; on pourra évoquer une musique parfois
un peu trop présente, un chant qui aurait pu s’arrêter
quelques minutes avant ou une fin qui aurait peut-être dû rester dans l’émotion
pure plutôt que de jouer la carte du ressort comique.
Qu’importe, Captain Fantastic est une
œuvre nécessaire, un conte sans morale accablante qui flirte
avec la perfection. L’un des films de l’année, tout simplement.
Note : 9,5 /10
Conseillé...
|
Déconseillé...
|
-Aux amateurs de films qui remettent en cause
le système sans accabler le spectateur.
-Aux fans de Viggo
Mortensen.
-A ceux qui pensent que
les films d'auteur sont prétentieux et soporifiques.
|
- Aux autres.
|
Prochaine critique: Snowden
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